Versailles Land
Ils étaient venus de l’Amérique du Nord, tous liés entre eux par leur appartenance à un fonds de pension d’investissements dans les biotechnologies.
Plus de 300 convives, venus passer une soirée parmi d’autres à Versailles. Arrivée à la fermeture au public du château pour un apéritif dans les jardins, une visite des salles du château ponctuées de petits orchestres et puis le repas dans la grande galerie des batailles.
Chacun était là parce qu’il possède une fortune investie dans des entreprises modernes dont le principal objet est la domination de l’agriculture mondiale par le brevetage des semences.
Le décor et les costumes sont d’époque, la musique et la compagnie sont baroques. Le prestidigitateur les amuse, les échassiers sont grands, Louis XIV et Richelieu sont dignes… Il y avait même un noir qui crache du feu. Il manque un nain.
Pour les hommes, le chic se porte terne, comme au bureau. On est maître du monde ou on ne l’est pas, ça demande un peu de sérieux. Chez les femmes on se doit d’être vulgaire. Froufrous et couleurs flashy des poupées Barbie. Ils sont riches mais manquent complètement de classe.
L’attachée de presse n’arrêtait pas de faire crise de nerfs sur crise de nerfs. Malmenant le photographe américain du voyage à la bouille ronde comme à peine sortie de l’enfance et souriante dès que sa chef tourne le dos.
On assiste à la confrontation de deux mondes. L’un se croit encore le centre du monde avec son folklore emperruqué pendant que l’autre sans culture décide de notre lendemain.
Ce soir à Versailles, demain à l’autre bout du monde, la terre est à eux, ils la consomment.
L’attachée de presse tourne encore et toujours, réclame de nouveaux passages des figurants, un nouveau morceau de musique pour ses invités de marque qui n’écoutent ni ne regardent ce qui se passe autour d’eux.
La soirée prend fin, tout le monde est las, l’ennui fatigue…